Je suis vide. Je suis une noix creuse. Un parasite. Réactive jamais créative. Je dis oui, ou je dis non, à ce qu’on me propose. Je ne propose rien. J’écoute les battements de cœur de l’autre, je m’y adapte pour donner l’illusion d’une communion. Et l’autre y croit parfois. Alors je me berce quelques minutes. Je pense que j’existe. Mais je connais au fond de moi mon stratagème. Il suffit de rester en ma compagnie quelques heures, quelques jours, et l’autre suffoque sous le vide sidéral de la relation. Je lui vole son souffle. Il s’étonne, de ne rien recevoir. C’est parce que je n’ai rien donné. Je n’ai rien à donner. Que le repos. Venez à moi vous reposer. Je ne vous troublerai pas. Mes désirs n’iront pas à l’encontre des vôtres. Venez à moi laisser éclore votre richesse. Il est rare de se trouver dans une atmosphère à ce point dépourvue d’ondes étrangères. Vous aurez toute la place auprès de moi. Et vous m’aimerez pour cela, pour la place que je vous laisse. Vous m’aimerez à cause de votre narcissisme. Vous m’aimerez parce que je vous laisse vous aimer totalement et sans reproche.
Je ne suis rien. Une pâte qui se modèle selon vos désirs. Je suis pour ceux qui ne recherchent dans la compagnie que leur propre reflet. Je suis la compagne de ceux qui n’ont pas besoin de compagnie. Marchez à mes côtés sans ressentir de présence. La vie qui m’entoure est évanescente. Je suis une coquille vide. Parlez-moi, je me modèlerai sur vos raisonnements. Ce que vous dites se répercute en moi comme une balle dans un hangar désert. Cela cogne, rebondit, mais rien de vital n’est atteint. Je peux tout entendre. Rien ne me heurte. Tout m’est indifférent. Si je vous parais intéressée, si je vous souris, c’est par calcul, pour vous garder, parce que la solitude extérieure m’est intolérable. Que je puise au moins, en vous, quelquefois, l’illusion que je suis bien là.
©Catherine Pierloz 2007