J’imagine la forêt de ce moment de minuit :
Quelque chose est là, qui respire
Tout près de la solitude de l’horloge
Et de cette page blanche où mes doigts courent
Pas une étoile à la fenêtre :
Quelque chose de plus proche
Quelque chose de plus enfoui dans les ténèbres
Vient pénétrer cette solitude :
Aussi froid, aussi délicat que la neige obscure,
Le museau d’un renard frôle la branche, la feuille;
Des yeux servent un mouvement, lequel ici
Et maintenant là, puis là, puis là
Imprime ses traces nettes sur la neige
Entre les arbres, et une ombre suit
Prudemment le long des souches
Ce corps qui a l’audace d’aller
Au hasard des clairières, dont l’œil
D’un vert agrandi, approfondi,
Occupé de ce qui le regarde,
Brille, se concentre
Puis, dans une soudaine puanteur puissante de renard
S’introduit dans la cavité obscure de la tête.
La fenêtre demeure sans étoiles; l’horloge fait tic-tac,
La page est écrite.
(Ted Hughes, Poèmes 1957-1994)