Je suis un cerf : aux sept dents de fer,
Je suis un flot : à travers une plaine,
Je suis un vent : sur un lac profond,
Je suis une larme : que le soleil laisse tomber,
Je suis un faucon : sur la falaise,
Je suis une épine : sous l’ongle,
Je suis la plus merveilleuse : des fleurs,
Je suis un magicien : qui donc, si ce n’est moi, Échauffe les têtes froides?
Je suis une lance : qui rugit pour du sang,
Je suis un saumon : dans un étang,
Je suis un leurre : pour le paradis,
Je suis une colline : où se promènent les poètes,
Je suis un tableau : barbare et rouge,
Je suis un casseur : faisant fi d’un arrêt,
Je suis un courant : qui entraîne à la mort,
Je suis un petit enfant : qui, si ce n’est moi, Jette un regard furtif hors de l’arche mal équarrie du dolmen?
Je suis le flanc : de chaque colline,
Je suis une flamme : sur chaque crête,
Je suis la reine : de chaque ruche,
Je suis le bouclier : pour chaque tête,
Je suis la tombe : de chaque espérance.
(Chant d’Amergin, ancien calendrier-alphabet celtique. Proposition de texte de R. Graves traduit par G. Trévoux)