
Tu bouffes tes cheveux aux prédires
un à un et poignée par poignée
comme les bêtes malades
c’est le grand arrachage
tu hurles sur les armures cassées
tu frappes ta tête frappes ta censure
le venir le passé dans tes yeux font la fièvre
tu casses tes griffes aux médisances
le venir le passé le mortier de tes murs
effrités à jamais farine sur la neige
tu vois d’avance dedans la main des autres
le bon grain le malheur et l’ivresse
dans le miroir pourtant tu ne vois pas
ce triangle à ton cou dégorgé le signe des anciens
l’affreux demain t’attend au coin
roc papier marteau dans sa main levée
écoute un peu le fracas les pas le moment le tic
écoute
ta rage à la criée contre les vents levés
ta rage qui sait la muselière et qui la voit venir
ton impossible envie d’être libre
chienne fofolle et sans aucun collier
A cette heure imprécise de chiens et de boue
à cette heure qui noircit les pattes
et appelle tes visions
tu guettes
sous ton poil la battue folle imprécise
ton cœur tes peurs
la chevauchée coupable de toujours vouloir plus
museau pointé droit sur l’attente
toi qui sais tout venir Cassandre tu ne sais pas
qu’à tant guetter tu ne vois rien
ni ta laisse ma main imprécise
ni ma poigne à ton col
ni la mousse qui monte
tranquille
au nord du nord de ton cul
Au fond du vase de ta rage reste le désir
tes derniers appartenirs
une médaille d’abandonnée gravée au nom de Pandore
et une patte de lièvre sciée sec à l’hiver
pour porter bonheur à une petite fille
qui souffrait de ses dents
Il pleut des enfances battues sur tes joues de ravage
la chiennée vive te rentre dedans
et ta peau de force prend sa forme
tu gémis tu gémis aux riens bêtes du vent
des tourmenteries et des becs soufflés
il pleut des vies adultes à la pelletée
la chienne de vie te mord aux dents
j’aurais voulu te protéger
te sortir des packs établis
te transvaser dans deux petits pots
un de formol et un de grand bordeaux
tout le mauvais de toi le sale
avec le vinaigré
tout le bon avec le doux
bien étiqueté
la vache de vivre te frappe aux flancs
tous les coups sont permis
la répression la honte le mal de vivre
la trace des autres jusque dans ton lit
dans ta panse répandue formidable
l’humiliation avalée jour après jour
Tourne ta bouche ouverte vers la tempête
avale
le sang du ciel et la misère des autres
avale
ce grand bol d’airs anciens
mange l’immense lac du désir
avale
les moments faibles
avale
ta perdure plus toute jeune
prends ton respir
ne souffle mot
la laisse au cou te gardera dans le champ des possibles
arrache ta colère comme une dent
avale
ton orgueil cueilli vif à sa source
avale
l’amour homogénéisé
prends ton souffle
ne respire pas
garde-toi de l’air pour les années à venir
avale
le jus de bras le crachin dans les mains
avale
les traces de tes dérives encore fraîches
avale
ton théorème marin par les racines
je veux tout le malheur pendant que je suis jeune
dis-tu
après il ne me restera plus que les desserts
prends ta gueule
ferme-la
avale et couds-la ferme
Nous perdions nos jappées et nos dents dans le concert funeste
des chiens morts-vifs encore debout
qui s’effritent doucement farine sur la neige
au sortir de ce siècle
nous perdions nos jappées nous étions deux
deux à se chercher des puces à se lécher les oreilles
tu seras Cassandre Tirésias la dernière à hurler
moi derrière à tenir debout tes cris
la dernière encore debout à oser appeler