Il y a certaines choses,
me coucher dans l’herbe
écouter le vent dans les feuillages
sentir l’odeur humide de la terre
entendre le cri des hirondelles, tôt ou tard dans la journée
qui ont le pouvoir de me redresser la colonne vertébrale.
Ces moments-là sont les moments de mes adoubements.
Ils me rendent à ma tranquillité.
—-
On détricote les ormes quand le soleil passe par leurs feuilles au seuil du jaunissement.
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Il y a des vieux sorts à déterrer.
Des sorts anciens dont il ne reste que les os.
Leur peau a fondu, ne subsiste que la trace de leurs cicatrices.
C’était au temps où les guerres se faisaient à coup de verbes tranchants.
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A trop se libérer, on manque de confrontation.
Battre le vide ne modifie pas le vide, ça épuise seulement.
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Y a-t-il une nouveauté à trouver quand on se tourne vers l’os et la racine?
Une nouveauté qui ne se guetterait pas dans l’air du temps mais six pieds sous terre.
Inverser les métaphores.
Ou imaginer un peuple neuf, les corps mentaux en dilatation constante, privés de souches.
Des êtres sans début ni fin, épargnés par la dichotomie et la causalité, condamnés au chaos mouvant des subjectivités superposées.
Pas d’ancrage.
Pas d’enracinement.
Pas de prise.
Pas de pieu.
Pas d’étalon or.
Pas de tradition.
La totalité à chaque instant.
Plus d’avant.
Ni d’après.
L’invalidation de la ligne du temps.
Comment vivre dans ce nouveau paradigme?
Sans projet, tout en survie.
Renoncer à l’histoire.
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Je cherche quelque chose à comprendre.
—
Qu’enseignent l’os et la racine?
L’os : cette vocation à ne pas disparaître, ou le plus tard possible.
Les racines : de quoi le devenir végétal est-il l’utopie?
—
L’arbre, l’hiver, les os à l’air.
—
Promener l’enfant.
Promener le chien.
Moment d’enracinements
Quotidiens.
—
Les invertébrés/Les désespérés.
©Catherine Pierloz – 2016