
Les prétentions, même peu fondées, lorsqu’on les soutient constamment, finissent toujours par assurer dans le monde une sorte d’état plus ou moins honorable, suivant leur genre, lorsqu’on a de la fortune, un peu d’esprit et une bonne maison : les observateurs et les gens malins s’en moquent ; mais on y cède ; il semble que leur ténacité les justifie. Les fats, décriés et méprisés par toutes les femmes, n’en passent pas moins pour des hommes à bonnes fortunes. Les importants sans crédit n’en imposent à personne ; cependant ils sont ménagés et sollicités par tous les ambitieux et les intrigants qui, à tout hasard, sur leur parole, pensent qu’il est prudent de les mettre dans leurs intérêts. Les prudes obtiennent les égards extérieurs qui sont dus à la vertu : les pédants, sans instruction réelle, jouissent, dans la conversation, de presque toutes les déférences accordées aux savants. En réfléchissant sur ce bonheur infaillible des prétentions persévérantes, qui pourrait attacher une grande importance aux succès de société?